Méthode des Potentiels Métra (MPM)
La Méthode des Potentiels Métra (MPM) est une technique d'ordonnancement et de gestion de projet, basée sur la théorie des graphes, visant à améliorer la planification d'un projet. Elle est développée pour aider à planifier, organiser et gérer les tâches dans des projets complexes. Elle est souvent utilisée dans des contextes de gestion de projets en construction ou dans d'autres domaines d’ingénierie nécessitant une organisation optimale des ressources et des délais.
Elle a été développée en France dans les années 1950, durant une période où l'ingénierie et la gestion de projets connaissaient un essor considérable. Elle a été introduite pour répondre aux besoins croissants de planification et de suivi des grands projets d'infrastructure, notamment dans les domaines de la construction et de l'aéronautique.
Origines et Développement
La MPM a été initiée par le professeur Bernard Roy et ses collègues, dont Jean Métra, un pionnier dans le domaine des mathématiques appliquées à l’ordonnancement. Jean Métra a été un acteur clé dans le développement de cette méthode, d’où son nom. Cette méthode est apparue en même temps que le PERT (Program Evaluation and Review Technique) aux États-Unis et le CPM (Critical Path Method), deux techniques similaires développées pour gérer des projets complexes. Alors que le PERT et le CPM étaient largement adoptés dans le monde anglo-saxon, la MPM a gagné en popularité en France et dans d'autres pays européens, notamment pour sa capacité à modéliser des projets en utilisant des graphes.
Contexte d’Émergence
Dans l’après-guerre, les grands projets de reconstruction et d'industrialisation requéraient une approche plus structurée de la planification. La MPM a ainsi été conçue pour répondre aux besoins des entreprises françaises en matière de contrôle des délais et de gestion des risques. Son application s’est d'abord concentrée sur les projets industriels et militaires, puis elle s'est progressivement étendue aux projets d'infrastructure et de construction.
Principes de Base de la Méthode MPM
- Graphes de tâches (ou de potentiel) : La méthode utilise un graphe orienté où chaque nœud représente un événement marquant le début ou la fin d'une tâche, et chaque arc représente une tâche avec une durée spécifique. Les tâches sont ainsi organisées pour respecter la séquence et la dépendance entre elles.
- Ordonnancement des tâches : La MPM permet d’identifier les tâches critiques et de calculer les marges de chaque tâche, afin de définir les priorités et les chemins critiques. Le chemin critique représente la séquence de tâches qui détermine la durée minimale du projet.
- Calcul des potentiels : La méthode repose sur le calcul de potentiels pour chaque événement (ou nœud) du graphe, représentant le moment au plus tôt (ou au plus tard) auquel chaque événement peut se produire. Ces potentiels sont essentiels pour déterminer les marges et identifier les chemins critiques.
Étapes de la MPM
1- Décomposition du projet : Identification des tâches et des événements du projet, et définition des relations de dépendance entre les tâches.
2- Construction du graphe orienté : Représentation des événements et des tâches sous forme de graphe orienté, avec chaque arc portant la durée de la tâche qu’il représente3- Calcul des dates au plus tôt et au plus tard : Pour chaque événement, on calcule les dates possibles d’apparition des événements, en commençant par le premier événement et en progressant vers la fin.
4- Détermination des marges : Pour chaque tâche, la marge représente le temps qu’une tâche peut être retardée sans affecter la durée totale du projet.
5- Identification du chemin critique : Le chemin critique est la séquence de tâches sans marge qui détermine la durée minimale du projet.
La Construction du Graphe MPM
Le graphe MPM permet de répondre aux questions suivantes :
- Combien de temps durera un projet ?
- Quand pouvons-nous commencer une certaine tâche ?
- Si cette tâche n'est pas terminée à temps, l'ensemble du projet sera-t-il retardé ?
- Quelle tâche devons-nous accélérer pour terminer le projet plus tôt ?
- Quelle tâche devons-nous accélérer pour terminer le projet le plus tôt possible ?
On construit le graphe à partir d'un tableau qui contient la liste des tâches, les durées des tâches et les contraintes d'antériorité.
Etape 01 : classer les tâches par niveau:
Niveau 1 :
tâches qui peuvent commencer immédiatement en début de projet (pas de contraintes d'antériorité).
Niveau n :
Tâches dont les tâches antérieures sont au maximum de niveau n-1.
Exemple basé sur le tableau de contraintes suivant :
Les niveaux:
Etape 2 : tracer le graphe.
Date du début au plus tôt :
La date à laquelle on peut débuter la tâche, parce que les tâches précédentes sont terminées.
La formule : = Max (Dates au plus tôt précédentes + durées précédentes).
Date du début au plus tard :
La date maximale à laquelle une tâche peut démarrer sans retarder la fin du projet.
La marge totale et la marge libre:
1. Marge Totale
Définition : La marge totale est le délai maximum dont dispose une tâche avant de retarder l'ensemble du projet. En d'autres termes, c'est le temps que la tâche peut être reportée sans affecter la date de fin prévue du projet.
Calcul : On calcule la marge totale en soustrayant la date au plus tôt de fin de la tâche de sa date au plus tard. Formellement :
Marge Totale=Date au plus tard−Date au plus tôt
- Prioriser les tâches sans marge pour éviter tout décalage dans la date de fin du projet.
- Réallouer des ressources vers des tâches critiques pour assurer leur réalisation dans les temps.
2. Marge Libre
Définition : La marge libre est le délai maximum dont une tâche dispose avant de retarder immédiatement les tâches suivantes. Autrement dit, la marge libre est le temps pendant lequel une tâche peut être décalée sans impacter directement ses successeurs dans le graphe des tâches. C'est le retard autorisé d'une tâche sans altérer la date de début au plus tôt de la tâche suivante .
Calcul : La marge libre est calculée en soustrayant la date au plus tôt de début de la tâche suivante de la date au plus tôt de fin de la tâche actuelle. Formellement :
Marge Libre=Date au plus tôt de la tâche suivante−Date au plus tôt de fin de la tâche actuelle
ou = Min (Dates au plus tôt suivantes) - Durée de la tâche - Date au plus tôt de la tâche.
Utilité : La marge libre est précieuse pour la gestion locale du projet, car elle permet de :
- Assouplir la planification des tâches, en offrant plus de flexibilité pour des tâches individuelles sans impacter les tâches suivantes.
- Faciliter les ajustements en cas de contraintes imprévues ou de retards ponctuels sans affecter l’ensemble du projet.
- Optimiser l'allocation des ressources en priorisant les tâches avec peu ou pas de marge libre pour éviter des retards en cascade.
Etape 3 : tracer le chemin critique.
Le chemin critique est la chaîne de tâches dépendantes qui n'ont pas de marge de manœuvre (c'est-à-dire que leur marge totale et leur marge libre sont nulles). Si l'une de ces tâches subit un retard, cela entraînera nécessairement un retard du projet dans son ensemble.
Etape 5 : interprétation du graphe.
L'interprétation d'un graphe MPM (Méthode des Potentiels Métra) est essentielle pour la gestion efficace d'un projet. Voici comment répondre aux questions essentielles relatives à l'accélération du projet et à l'incidence des retards ou des avances des tâches :
Questions Essentielles et Réponses
1-Comment faire pour accélérer le projet ?
- Réallocation des ressources : Concentrez davantage de ressources sur les tâches critiques (sur le chemin critique) pour réduire leur durée.
- Compression du temps (crashing) : Identifiez les tâches sur le chemin critique qui peuvent être terminées plus rapidement en augmentant les ressources ou en modifiant les méthodes de travail.
2-Si telle tâche est retardée, quelle est l'incidence sur la durée totale du projet ?
- Tâche sur le chemin critique : Si la tâche fait partie du chemin critique, le retard entraînera un retard équivalent de la durée totale du projet.
- Tâche non critique : Vérifiez les marges (marge totale et marge libre). Si la tâche a une marge totale de zéro, elle impactera également la durée totale.
3-Si telle tâche est avancée, quelle est l'incidence sur la durée totale du projet ?
- Tâche sur le chemin critique : L’avancement de cette tâche peut réduire la durée totale du projet.
- Tâche non critique : L’avancement peut permettre de commencer plus tôt les tâches suivantes, potentiellement réduisant le temps global.
4-Quelles tâches ont des marges importantes ?
- Flexibilité : Les tâches avec des marges importantes offrent une flexibilité pour déplacer des ressources vers les tâches critiques sans risque immédiat.
5-Quels sont les goulots d'étranglement potentiels ?
- Identification des dépendances : Les tâches avec de nombreux successeurs ou qui sont en amont de plusieurs tâches critiques sont souvent des goulots d'étranglement.
6-Comment les changements dans le calendrier des tâches affectent-ils les autres tâches ?
- Interdépendance : Examinez les dépendances entre les tâches. Les changements dans une tâche peuvent entraîner des modifications dans les tâches successeurs.
7-Quelle est la durée restante du projet si toutes les tâches avancent de deux jours ?
- Impact global : En avançant toutes les tâches, recalculer la durée en tenant compte des tâches sur le chemin critique et des marges des autres tâches.
Conclusion:
La Méthode des Potentiels Métra (MPM) est un outil clé pour la gestion de projets, permettant une planification efficace grâce à des graphes orientés. Elle identifie le chemin critique, calcule les marges et clarifie les dépendances entre les tâches. Cela permet aux gestionnaires de prioriser les ressources sur les tâches essentielles, d'anticiper l'impact des retards et d'optimiser le déroulement du projet. En somme, la MPM facilite une prise de décision éclairée et une adaptation rapide aux imprévus, renforçant ainsi la performance des projets.